Poésie sur le vif
POÈMES
Six heures du mat’
Orly/Roissy,
Oiseaux de nuit,
Zombies …
Sombres silhouettes,
S’avançant sans mot dire,
Se saluant sans sourire,
Se cognant sans rien dire,
S’ignorant sans en rire…
L’ordi est sur le dos,
Le regard est mi-clos,
Le teint est très citron…
Il a coupé le son,
Citron est pâlichon !
Le cerveau englué,
Pas pris l’temps de déjeuner :
Le café pas passé,
Citron est trop pressé…
C’est la sécurité,
Le passage obligé !
Rien à me reprocher,
Et rien à déclarer,
J’en ai rien à cirer…
« Retirez vos chaussures »
Mais je viens de les mettre !
« Retirez la ceinture »
Mais c’est mon pyjama !
C’est un petit matin
Tout à fait ordinaire
Pour un homme d’affaire
Qui a bien trop à faire…
« Parlez-moi doucement,
Tout est nuit, tout m’est bruit
Tout me nuit, tout m’ennuie… »
Fin de la sécurité
C’est la salle d’attente,
Vous avez dit attente ?!
Salle des pas perdus,
Car on n’embarque plus !
L’avion est retardé,
On vient de l’annoncer ;
Brouillard à l’arrivée…
Ya un nuage dans ma tête.
Je n’suis pas à la fête.
C’est que j’voudrais dormir
Posé là, sans rien dire,
Dans l’oubli, près de l’ennui,
Jusqu’au bout de la nuit.
Tiens donc! Bonjour Céline
Tout invite à la paix
Quand on est en face au ciel
Un arbre ou un enfant…
Alors, pourquoi la guerre
Sinon pour satisfaire
L’appétit de puissance
De ceux qui voudraient bien
Se partager le monde
En un huit clos serein,
Sans même se rendre compte
Qu’il s’agit d’une prison,
Sans même s’apercevoir
Que le cosmos est grand
Et qu’ils n’ont pas la clé.
On parle très souvent
Du Bon Samaritain*
Et de l’exemple à suivre.
On ne parle jamais
De lui, dans le fossé,
Qui s’est fait tabasser,
Le samaritainé.
Ils l’ont laissé pour mort
Auraient mieux fait de l’achever.
Les urgences d’un hosto
En savent quelque chose,
C’est que l’on n’est pas beau
Dès lors qu’on est blessé.
On préfèrerait alors
Garder les ailes du nez
Enfoncées dans la terre
Pas loin de la rigole.
On voudrait s’y enfouir
Attendant d’y germer
Si l’été doit venir.
N’est-ce donc pas très bête
Très ridicule aussi
De se laisser charger
Sur une vague monture
Aux yeux de la terre entière
Disant adieu au look
Et bonjour à l’allure !
On est vraiment blessé,
Tout à fait mortifié.
On voudrait se cacher,
Surtout ne pas porter
L’inquiétude des autres
En plus de la sienne.
C’est le refus de l’Autre,
De tous les autres avec.
On ne sait même pas
Si ce blessé de la vie
Lorsqu’il fût guéri
A pu tout rembourser
De l’huile au pichet de vin
Avec toutes les nuitées.
Car ne l’oublions pas
Il n’avait plus un sous,
L’avaient dévalisé
Et laissé sans un rond
De nos jours c’est la honte.
A-t’il seulement guetté
De près comme de loin
Le Bon Samaritain
Qui devait repasser ?
A-t’il seulement pensé
À lever une main
Quand l’Autre est repassé
Et repassé encore ?
A-t’il seulement voulu
Lui dire un grand merci
Par un tout petit mot
Et pourquoi pas une brève !?…
Allez donc le savoir…
*à propos de la parabole du Bon Samaritain, Luc 10, 29
Elle est sortie
Cette inconnue
Vêtue de noir
Pâle comme un linge.
Les yeux fermés,
Est soutenue…
Elle ne voit rien,
Elle ne dit mot.
C’est la souffrance
Qui monte au jour,
Elle n’a pas froid,
Elle ne sait pas,
Elle ne voit rien.
Dans la lumière
Elle s’est perdue
Voudrait s’cacher
Mais c’est trop tard,
L’ai reconnue.
Elle a sa place,
C’est bien comme ça,
Vais pas la tuer
Elle s’enfoncerait
Au fond du trou
Mains en avant,
Comme une aveugle.
Vais la garder
La mettre à l’ombre
Et je vais jouer
Juste à côté,
L’apprivoiser…
Vais lui donner
Droit d’exister ;
Plus de compte à rendre
Elle peut souffler,
Se reposer.
Fille de joie,
En rêve,
Je voudrais
Y être…
Pourquoi tu ris,
Donner d’la Joie,
Quoi de plus beau ?
En vérité…
Ce qu’elle nous donne,
Qu’on lui pardonne,
C’est du plaisir,
Vrai déplaisir…
Très éphémère,
Utilitaire,
Bien terre à terre.
Si le mot Joie
Voulait dire Foi,
Foi dans la vie,
Foi dans l’avenir,
Foi dans la Joie,
Ça prendrait sens
Fille d’Espérance…
Et si parfois
Elle donne Joie,
Dans la fêlure
D’un court instant,
Qu’elle reste dedans
Rien qu’un moment…
Sans même m’en rendre compte
Dans le couloir du métro
Je viens de bousculer
La marche d’un aveugle,
« Je vous demande pardon
Je ne vous avais pas vu »
Lui dis-je-distraitement …
Sachez que moi non plus
Me répondit sa canne
Tandis qu’il s’éloignait,
Souriant de ma bé vue.
Dans ce mot là
Il y a trans…
Donc un avant
Puis un après,
Et au milieu
Cerceau en feu !
Ça bouge un peu
Ça tourne beaucoup…
Vertige des profondeurs
Attrait de la pesanteur
Je voudrais tant voler
Être déjà demain
Sans plus de lendemain.
Mais ce matin
Dans ce mot là
Il y a transe…
Laissons la faire,
Allons bouger
Sans plus tarder
Nous éclater
Sans nous fermer
Pour nous former
Nous informer
Nous transformer
Quand on perd connaissance C’est l’attention qui chute…
On tombe dans le vide,
On se retrouve à terre,
On peut se faire très mal.
On tâtonne à l’aveugle,
On cherche partout le sens.
Quand on ne sait plus rien,
On ferme les paupières
On aspire à de l’air,
On s’ouvre à la conscience,
Adieu la connaissance
Bonjour la renaissance.
Je suis garçon manqué,
En manque de garçon
Car j’avais oublié
Que j’étais une femme…